Les Noces Funèbres

Un oiseau de mauvais augure blanc comme neige

C’était une fin de soirée paisible.

Harold avait passé une journée épuisante, il avait dû parcourir le domaine en long et en large du matin jusqu’au début de la soirée et il s’était effondré à la maison, sur son lit, pendant une petite heure. Un peu reposé, il s’était relevé pour se préparer à dîner. Parfois, il allait manger dans la Grande Salle avec les enfants et ses collègues, mais ce soir-là, il ne se sentait pas capable de faire le chemin, même avec l’aide de sa canne.

Il s’était assis à sa petite table pour manger une bonne portion de soupe et quelques tartines de chèvre frais accompagnées par une part de tarte à la mélasse qu’il s’était acheté lors de son dernier passage aux Trois balais la veille. Il allait souvent passer des soirées à la taverne et depuis qu’il travaillait à l’école, il était devenu un habitué et était familier de tous les clients et de tous les employés de la taverne. Il y mangeait aussi parfois le soir et il lui arrivait régulièrement de s’acheter de quoi manger chez lui, comme ça il n’avait pas besoin de cuisiner, même s’il appréciait de se mettre aux fourneaux.

Installé dans son fauteuil, il s’était enroulé dans un plaid après avoir enfilé sa tenue de nuit et il bouquinait. Léon dormait profondément dans son panier tandis qu’Harold parcourait les pages de son roman, se demandait qui était le coupable d’un vol de tableau. L’action était trépidante, mais les yeux du garde-chasse commençaient tout doucement à se fermer. Alors qu’il s’assoupissait, sa tête penchant de plus en plus sur l’accoudoir du fauteuil, il fut tiré de son demi-sommeil par un bruit sourd. Il se redressa d’un coup, faisant tomber plaid et livre sur le sol. À la fenêtre, il repéra une forme blanche et en sortant, il reconnut immédiatement Snowy, la chouette blanche d’Elyana Sleepy, une élève de Gryffondor qui venait souvent rendre visite à Harold. La jeune fille prenait soin de sa chouette et il était donc étonnant que l’animal se retrouve seul dehors en étant aussi paniqué. Si Snowy était venu frapper chez Harold, c’était sans doute qu’Elyana avait des soucis. Alors qu’il se disait cela, la chouette s’envola rapidement en direction du château.

Harold ne savait pas trop d’où la chouette avait pu venir, mais il se doutait, malheureusement, qu’Elyana ne trouvait sans doute pas dans le château, Snowy n’aurait sans doute pas pris la peine de venir le prévenir si ça avait été le cas.

*Elle n’est tout de même pas partie dans la forêt ? Elle n’aurait pas emmené sa chouette avec elle, elle tient trop à sa sécurité. *

Un endroit où la jeune fille emmenait sa chouette, c’était Pré-au-Lard. Elle avait pu y passer du temps dans la journée, comme elle en avait souvent l’habitude. Pourtant, il était bien tard et à cette heure tardive, les bars devaient commencer à fermer.

*J’espère qu’elle ne s’est pas attiré d’ennuis. *

Il ne tarda pas longtemps à décider de partir à la recherche d’Elyana. Il retira son pyjama et enfila rapidement un jean, un tee-shirt surmonté d’une chemise à carreaux et enfila par-dessus une veste, car la température était fraiche sous le ciel étoilé. Il prit les clefs de la grille du château, sa baguette puis il sortit de sa cabane. Son compagnon ayant été réveillé par la chouette et la chute des objets, celui-ci le suivit à l’extérieur.

— On va chercher Elyana. Tu te souviens bien d’elle, n’est-ce pas ? Cherche sa piste, lui dit-il avant d’agiter sa baguette devant lui. Lumos !

Une douce lueur s’échappa de la baguette. Au moins, si Snowy était allée prévenir d’autres personnes, celles-ci pourraient le repérer facilement et le rejoindre dans ses recherches. Le chien suivait une piste qui le menait très clairement dans la direction des grilles.

*Elyana… que t’est-il arrivé ?* pensa-t-il anxieusement.

Les noces funèbres

Un nuit...étrange

Harold marchait nerveusement vers la grille, talonnant son chien de près. Il faisait vraiment sombre et cela ne le rassurait pas du tout. Une jeune fille perdue toute seule à Pré-au-Lard en pleine nuit… ce n’était pas bon.

Il fut vite rejoint par de nouveaux compagnons. Il s’attendait à voir Jin, car il se doutait un peu que Snowy aurait l’idée d’aller le prévenir, Elyana passant un peu trop de temps dans son bureau en compagnie de Judith, sa comparse. Il était heureux de voir Caledon et Sylvinia, toute aide était la bienvenue et il appréciait bien ces deux-là. Il les salua tous puis écouta ce que Jin avait à dire. Il n’y avait pas pensé, mais en effet, il y avait fort à parier que Judith soit également impliquée dans l’affaire.

Deux jeunes filles perdues à Pré-au-Lard en pleine nuit.

De mieux en mieux.

Harold avait effectivement entendu parler de l’agression de la jeune femme dans le village et en avait été attristé. En effet, même s’il n’avait jamais vraiment discuté avec elle, elle faisait partie des habituées qu’il appréciait de voir ; elle faisait partie des meubles, en gros.

Il était hors de question que les deux jeunes aient à subir la même chose. Il espérait que rien de grave ne leur était arrivé, mais vu la panique de la chouette…

Il fut un peu étonné par la remarque de Caledon. Si Harold savait que Judith avait deux grands frères, il ne voyait pas bien pourquoi le concierge avait plus pensé à l’un d’entre eux, alors qu’il était évident que Jin parlait de la jeune rouquine. Il se désintéressa de la réponse, trop angoissé par la situation. Il sortit les clefs de la grille, l’ouvrit et la referma derrière lui lorsque tout le monde fut passé.

Sur le chemin qui les menait à Pré-au-Lard, il n’était qu’angoisse. Il avait l’habitude de marcher ici pour se rendre au village, mais c’était la première fois qu’il y allait aussi tard. Rentrer à cette heure (ou plus tard) cela lui arrivait régulièrement après une soirée à bien manger et bien s’amuser.

Arrivé au village, il fut surpris. C’était si vide… si… calme.


Certes, il était tard, mais à cette heure-là, normalement, il y avait encore quelques retardataires et là… personne. Vraiment personne.

— Ce n’est pas normal… vous ne ressentez pas quelque chose… d’étrange ?

Depuis qu’il était entré dans le village, il ressentait un truc de bizarre et il n’arrivait pas déterminer quoi. Peut-être que les autres sauraient de quoi il s’agissait… parce que lui, il pédalait dans la semoule !

Léon se mit soudainement à courir pour suivre Snowy, poussant Harold à accélérer vers Les Trois Sorciers. Léon avait senti son ami Wouf, le chien d’Ewen, un jeune homme avec lequel Harold passait toujours d’excellentes soirées à la taverne. Derrière le chien désespéré, le jeune auror gisait, entre conscience et inconscience. Harold courut vers son ami et sentit, en fronçant le nez, la forte odeur d’alcool qui émanait de lui. Il avait l’habitude de s’enivrer beaucoup, mais jamais à ce point. Et près de lui, cette sensation étrange était bien plus forte.

— Ewen, mon pote… qu’est-ce que tu as fait ? se lamenta-t-il.

Il savait qu’il n’y avait pas que l’alcool derrière tout ça et il repéra le bout de tissu que tenait le jeune homme. Il le désigna à l’un de ses compagnons d’aventure tandis qu’il s’occupait d’Ewen. Il ne fallait pas qu’il sombre dans l’inconscience alors qu’une jeune fille, peut-être même deux, était en danger.

Il sortit sa baguette et l’agita devant le visage d’Ewen. Si son sort fonctionnait, cela lui ferait peut-être du bien et lui permettrait de rester conscient. Au moins, il respirait, c’était déjà ça de pris.

— Aguamenti.

Titre du RP

Une nuit glaciale

Alors là, Harold ne s’attendait pas à un tel échec. Évidemment, il avait déjà lancé ce sort plusieurs fois, mais c’était la première fois qu’il finissait autant trempé. Son inquiétude pour Ewen avait dû transparaitre dans son sort qui s’était retourné contre lui. Jin et Caledon n’avait pas pris de gant avec le jeune homme, l’un lui collant une gifle et l’autre lui appuyant sur la main d’une manière qui ne devait pas être agréable du tout.

Tellement pas agréable qu’Ewen se réveilla en hurlant. Harold était bien content de ne pas être à sa place et il espérait que la douleur finirait par disparaitre. Ce devait être Caledon qui avait vraiment réussi à le réveiller à cause de ce qu’il lui avait fait, apparemment qu’une personne qui s’était occupée de lui lui avait fait alors qu’il était enfant. Si ça provoquait ça chez un homme adulte, il n’osait pas imaginer la réaction d’un petit garçon.

En fait, Ewen semblait dire qu’il n’était pas endormi, alors Harold ne comprenait pas bien ce qu’il se passait pour son camarade. Il semblait bien connaître Jin, mais tout ce qu’il disait était incohérent et ça ne venait clairement pas de sa consommation d’alcool et d’opiacés divers et variés.

Une connasse de mariée ?

Bon, au moins, il confirmait qu’Elyana était la seule à être présente et que Judith était sans doute en sécurité au château. Par contre, Elyana devait s’être fourrée dans une drôle de situation et être en danger. Et elle était toute seule, sans doute en compagnie d’une femme bizarre déguisée en mariée.

Mais qu’est-ce qu’il se passait !

Un son très étrange venait des autres rues. Ce n’était pas du tout un son agréable… et même carrément angoissant.
Harold appela Wouf, et cela lui fit un drôle d’effet d’aboyer pour appeler le chien et l’animal vint vers lui. Il appela aussi Léon à venir à ses côtés. Il retira délicatement le bout de tissu des doigts d’Ewen et l’agita devant la truffe des deux chiens pour qu’ils le reniflent. Ils trouveront peut-être une piste à suivre au lieu de se perdre dans les rues sombres de Pré-au-Lard.

— Cherchez une piste. Il faut retrouver Elyana.

Il espérait que ce ne serait pas trop tard et qu’ils pourraient venir en aide à la jeune fille. Il n'allait pas très bien, en plus. Trempé alors qu'un vent glacial venait de se lever, ça ne présageait rien de bon pour lui et pour sa santé. Et ce bruit effrayant ne ferait pas du bien à sa santé mentale, surtout si la jeune fille n'était pas saine et sauve.

Les noces funèbres

De la soupe à l'apéro

Rupert ne s’attendait à rien, mais il avait été quand même déçu.

Quelques jours plus tôt, il avait reçu, à Londres, un hibou d’un petit groupe indépendant qui avait prévu de jouer à La tête de sanglier et qui souhaitait que Rupert vienne les voir jouer dans le but qu’il écrive un article, positif, évidemment, sur leur prestation. Comme le fait que Rupert était le fondateur, rédacteur-en-chef et seul rédacteur de la revue indépendante The Whisper, il était venu légèrement grimé pour que des habitués ne puissent pas le reconnaitre. Il ne venait pas souvent dans l’établissement, lui préférant de beaucoup l’ambiance cosy des Trois balais, mais il lui arrivait de venir y boire une pinte quand les autres troquets de la petite ville sorcière étaient bondés. Le déguisement n’était pas très élaboré, mais il suffirait bien à tromper les poivrots qui éliraient domicile dans le bar pour la soirée.

Franchement, il aurait mieux fait d’aller aux Trois balais. Ou mieux, de rentrer chez lui à Londres pour passer la soirée avec Germain. Il n’avait pas invité son compagnon à passer la soirée avec lui, se doutant que celle-ci ne serait pas trop à son goût. Germain n’étant pas le journaliste du couple, il n’avait pas à subir les soirées de ce genre et il en était bien content, contrairement à Rupert qui devait toutes se les cogner.

En arrivant dans l’établissement, il avait commandé une bière qu’il savait frelatée. De la vraie pisse d’âne. Le groupe monta sur scène presque une heure plus tard, affichant un retard de près de quarante minutes au compteur. Rupert avait l’habitude d’appeler la mauvaise musique de la soupe. Ce groupe-là lui en avait servi une pleine assiette de la pire soupe. S’il avait dû faire une métaphore, il aurait parlé de soupe noyée dans l’eau, avec des légumes rachitiques jouant à cache-cache avec l’assaisonnement. Autant dire qu’il aurait été particulièrement salé.

Mais il n’écrirait pas cet article. Auparavant, il l’aurait fait, car son patron le lui aurait ordonné. Mais là, c’était lui le patron et il était le seul décisionnaire. Il voulait mettre en avant des petits groupes, pas les enfoncer plus bas que terre. Ils devaient déjà l’être vu les réactions du reste du public. La moitié comatait, un quart les traitait de gros nuls et le dernier quart vomissait tripes et boyaux dans un pot de fleurs. Il fallait dire qu’en plus de Rupert et du barman, il n’y avait que quatre autres clients, tous dans un état d’ébriété avancé.

Et une soirée de perdue, une !

Le groupe quitta la salle sans un mot, sans doute conscient que personne n’allait leur demander un rappel. Rupert attendit dix minutes après leur départ et il quitta à son tour l’établissement, se retrouvant subitement en plein coup vent. Qu’est-ce qu’il faisait frais !

Comme il était franchement très tard, il ne savait pas ce qu’il allait faire. Rentrer chez lui au risque de réveiller son compagnon, véritable ogre lorsqu’on le tirait du sommeil ? Ou bien tenter de rentrer à Poudlard, au risque de rester coincé à la grille si le garde-chasse n’était pas de sortie forestière ce soir-là ?

Il choisit la deuxième option. Au pire, il pourrait transplaner chez lui et affronter les foudres de Germain. Ce ne serait pas la première fois et sans doute pas la dernière.

Plus il avançait dans la ville et plus l’ambiance se faisait pesante. Ce n’était pas du tout agréable, mais il tenait à marcher un peu pour se maintenir en forme. C’était important à son âge et il ne voulait pas devenir un de ces vieux qui se négligeaient. D’ailleurs, il était toujours grimé, mais facilement reconnaissables pour ceux qui le connaissaient… et les personnes non torchées.

Il se retourna d’un bond en entendant un cri résonner entre les rues. Un cri de femme qui lui avait fait froid dans le dos et qui le poussa à accélérer le mouvement. Il avait entendu une histoire sur l’agression d’une femme peu de temps avant et ça ne le rassurait pas.

Mais si une personne se faisait réellement agresser et qu’il n’agissait pas, ça ferait de lui un lâche… et il n’aiderait pas une personne en danger, ce qui constituait un délit. Et puis son âme de reporter se réveilla. Il pouvait enquêter sur tout cela, c’était le genre d’articles qu’il pourrait apprécier d’écrire et de publier.

Tant qu’il ne laissait pas une femme en danger.

En tournant dans une rue, il aperçut la lueur d’un lumos et tomba sur un groupe dont il reconnut facilement les membres, sauf une, une demoiselle d’origine asiatique. Il ne connaissait pas bien le jeune homme évanoui, mais il avait bien l’impression qu’il n’était pas dans cet état à cause de l’alcool. Il l’avait déjà vu engloutir des galons d’alcool sans rencontre le moindre souci. La présence du garde-chasse, du concierge, d’une professeure et, en plus, du sous-directeur dans le village à une telle heure était bien plus préoccupante. Surtout qu’il avait entendu une bribe de la conversation, notamment la dernière phrase de la dénommée Koko.

– Bonsoir. Quand vous dites qu’une jeune fille a disparu, vous ne parlez pas d’une élève j’espère ? En tout cas, vous pouvez compter sur moi pour les recherches, je cherchais justement à savoir d’où venait ce cri horrible.

Imitant la jeune femme, il sortit sa baguette de sa veste.